Pourquoi les procès ne peuvent-ils pas être filmés ?

Publié le par Apprenti Juriste

On a tous remarqué dans la presse les dessins illustrant les grandes affaires judiciaires. Les journalistes sont certes des grands artistes dans l'âme, mais surtout, ils n'ont pas le choix. En France, le principe est l'interdiction de toute prise de vue d'une audience. C'est à dire que non seulement vous ne pouvez pas filmer mais il n'est pas possible non plus de photographier une audience et même pas d'enregistrer des extraits audio avec un dictaphone. Ce principe résulte de la loi que je vous reproduit ci-dessous :

Loi n° 54-1218 du 6 décembre 1954 venant modifier l'article 39 de la loi du 29 juillet 1981 sur la liberté de la presse en vue d'interdire la photographie, la radiodiffusion et la télévision des débats judiciaires. L'assemblée nationale et le Conseil de la République ont délibéré; L'assemblée Nationale a adopté, Le président de la république promulgue la loi dont la teneur suit :
Art 1er - Il est inséré dans l'article 39 de la loi du 29 juillet 1981 sur la liberté de la presse un alinéa ainsi conçu : « Pendant le cours des débats et à l'intérieur des salles d'audience des tribunaux administratifs ou judiciaires, l'emploi de tout appareil d'enregistrement sonore, caméra de télevision ou de cinéma est interdit. Sauf autorisation donnée à titre exceptionnel par le garde des sceaux, ministre de la justice, la même interdiction est applicable à l'emploi des appareils photographiques. »
Article 2 – La présente loi est applicable à l'Algérie, aux territoires d'outre-mer, ainsi qu'au Togo et au Cameroun. La présente loi sera exécutée comme la loi de l'Etat. Fait à Paris, le 6 décembre 1954. René Coty Par le président de la république ; Le président du conseil des ministres, Pierre Mendès-France Le garde des sceaux, ministre de la justice, Guérin de Beaumont ,Le ministre de l'intérieur, François Mitterrand, Le ministre de la France d'outre-mer, Robert Duron


Ce principe est encore en application aujourd'hui et il n'est donc en principe pas possible de filmer une audience.

Pourquoi ?
Il y a de nombreuses raisons qui ont poussé le législateur très tôt à faire interdire les caméras dans les salles audiences et qui tiennent essentiellement à la protection de la défense. D'abord, le législateur a voulu éviter de troubler la tranquillité (toute théorique) des débats. On imagine aisément le bazar que peut être l'installation des chaines de télévision dans une salle d'audience. Et puis dans des affaires médiatiques, l'avocat risquerai de plaider pour la caméra et non pour le juge.
En plus de ça, il peut être préjudiciable pour un accusé que soient filmés des extraits qui seraient médiatisés à l'entière discrétion des journalistes. On imagine aisément un procès d'assise d'un violeur présumé dans lequel le journaliste parvient à saisir un bref instant une mimique qui donne à l'accusé un visage de violeur. La photo fait alors le tour des médias et les jurés qui pendant la durée du procès restent en contact avec le monde extérieur peuvent facilement être influencés. Evidemment la médiatisation des procès à déja lieu et cause pas mal de soucis à la présomption d'innocence mais justement, ce n'est pas la peine d'en rajouter.

Des exceptions ?
La loi Badinter du 11 juillet 1985 tendant à la constitution d'archives de la justice  (modifiée par l'ordonnance du 24 février 2004 mais qui l'a simplement « rangée autre part ») permet d'enregistrer une audience dans le but de conserver une trace historique de celle-ci. Ainsi, le film en question ne pourra pas être visionné pendant 20 ans sauf autorisation du ministre de la justice ou de la culture et ne pourra pas être reproduit pendant 50 ans, là encore sauf procédure exceptionnelle (article 8 de la loi du 11 juillet 1985). Le procès AZF qui se déroule actuellement devant le tribunal de grande instance de Toulouse est filmé dans le cadre de ce dispositif. En dehors de ce cas, il est légalement impossible de filmer une audience.

Mais, pourtant ?

Oui mais me direz-vous, il existe des images d'audiences. Il en existe dans le film "10e chambre, instants d'audience", dans certains reportages de zone interdite et même cette semaine dans le journal de France 2. Vous avez parfaitement raison, sauf que ces images ,si elles sont prises la plupart du temps avec l'accord des présents, sont prises en totale contradiction avec la loi.

Publié dans Droit

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P
La loi sur la liberté de la presse date du 29 juillet 1881 et non 1981!
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L
on se fait chier :')
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F
lol
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U
Hey <3
M
Cette interdiction de filmer un procès se retrouve aussi dans les pays de common law.Ce qui est fort dommage, car les magistrats du royaume uni ont fière allure, avec leur perruque.
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