L'histoire de l'abolition de la peine de mort en France

Mais remontons bien en arrière si vous le voulez bien, remontons à la première tentative d'abolir la peine de mort. Celle-ci remonte bien avant 1981 puisque le premier débat officiel sur la peine de mort en France date du 30 mai 1791, avec la présentation d'un projet de loi visant à l'abolir. Son rapporteur, Louis-Michel Lepeletier de Saint-Fargeau est soutenu notamment par Maximilien de Robespierre. Cependant, l'Assemblée nationale constituante, promulgue une loi le 6 octobre 1791 refusant d'abolir la peine de mort, mais qui supprime la torture.C'est également avec cette loi qu'est uniformisée la méthode d'exécution, Tout condamné à mort aura la tête tranchée, cette célèbre phrase restera dans le Code pénal français jusqu'à l'abolition, en 1981.
Cette période est caractérisée par une euphorie législative avec un législateur galvanisé par les bouleversements politiques qui va faire des avancées énormes qui seront quasi-intégralement supprimées dans les années qui ont suivies. Notamment l'esclavage, aboli le 16 pluviose an II (4 février 1774) qui sera ensuite rétablie par Napoléon par la loi du 20 mai 1802. En matière de peine de mort, il n'y aura pas besoin de rétablissement puisqu'il n'y aura pas d'abolition.
Il faut attendre 1906 pour voir ce débat atterir à nouveau chez le législateur. En l'espèce, les députés refusent de voter les crédits pour faire fonctionner la guillotine, moyen astucieux pour faire valoir leur point de vue. En 1908 est présenté un projet de loi pour l'abolition de la peine de mort défendu par Jean Jaurès mais celui-ci est rejeté par 330 voix contre 201.
Le 11 mars 1963, le lieutenant colonel Bastien-Thiry est le dernier condamné fusillé, il était responsable de l'attentat du petit clamard contre le géneral De Gaulle (il lui reprochait l'abandon de l'Algérie française).
Le 28 novembre 1972, Roger Bontems et Claude Buffet sont les derniers condamnés à être exécutés à Paris. Leur procès marque un tournant dans la lutte contre la peine de mort. D'abord, l'affaire en elle-même est assez particulière. Il s'agit d'une tentative d'évasion de prison avec prise d'otages. Claude Buffet est à l'origine de cette tentative et au moment de l'intervention des forces de polices, il tranche la gorge de deux otages dont une infirmière. Cet affaire provoque l'émoi dans l'opinion publique qui demande la tête de l'accusé. Bontems sera condamné à mort et exécuté au même titre que Claude Buffet alors que la Cour a reconnu son statut de complice et en aucun cas d'auteur des meurtres. Pour beaucoup y compris partisans de la peine de mort, cette condamnation est injuste.

D'autre part, ce procès est le premier d'une série pendant laquelle Robert Badinter alors avocat et professeur de droit combattra avec ferveur la peine de mort. Ce procès sera pour lui un grand choc. Il avait pris fait et cause pour son client, Bontems et l'exécution de celui-ci lui sera très douloureuse.
Après Buffet et Bontems, seuls 4 condamnés à mort seront exécutés en France, tous pour infanticide.
En 1976, Maitre Badinter parvient à faire échapper à la guillotine Patrick Henry poursuivi pour infanticide à l'issue d'un réquisitoire talentueux au cours duquel il prononcera notamment ces mots "Condamner à mort ce n'est rien de moins que prendre un homme vivant et le couper vivant en deux parties." Il dira aussi aux jurés "Si vous condamnez à mort, vous aurez toute votre vie, en votre conscience, la mort d'un homme."
Cette affaire marque incontestablement un grand pas vers l'abolition.
Le 10 septembre 1977, Hamida Djandoubi, responsable de la torture et du meurtre d'une enfant de 15 ans sera le dernier condamné à mort exécuté en France et en Europe Occidentale.
En octobre 1978, les députés comme en 1906 coupent les crédits pour le fonctionnement de la guillotine.
Le 9 octobre 1981, la loi est promulguée, la peine de mort est définitivement abolie.
Depuis le 23 février 2007, l'interdiction de rétablir la peine de mort a été inscrite dans la Constitution. Il faudrait ainsi une réforme de la Constitution (vote des 3/5 du Congrès) ainsi que la sortie de l'Union Européenne pour rétablir la peine de mort.
D'après un sondage réalisé en septembre 2006 par TNS Sofres, 42 % des Français sont favorables au rétablissement de la peine de mort. Ce chiffre atteint jusqu'à 80% chez les sympathisants du front national, 60% à l'UMP, 30% au parti socialiste et 29% au parti communiste français.
A noter :
Dans les pays qui pratiquent la peine de mort et en particulier aux Etats-Unis, une procédure spécifique est utilisée pour ne pas rendre un homme responsable de la condamnation, il y a deux boutons qui commandent l'injection et un des deux est inopérant.
Un procédé similaire était employé avec les pelotons d'exécution dans lesquels un des tireurs avait des balles à blanc à son insu.